Trieste est une ville italienne à part et nombre d’intellectuels et d’écrivains ont succombé à son charme. Qu’est-ce qui la rend si spéciale en plus d’offrir des plages en ville et la montagne tout près ?
Trieste est une ville originale à plusieurs égards. D’un point de vue géographique, elle semble poussée vers l’Adriatique par la Slovénie dont elle n’est distante que de quelques kilomètres.
Son histoire en fait une ville très cosmopolite. Après avoir fait partie de l’empire austro-hongrois dont elle était le débouché maritime. Elle en a été séparée après la Première Guerre mondiale, a été ballottée entre les différentes nations l’entourant, a été envahie par Tito avant de redevenir officiellement italienne en 1954.
Tout cela ne l’a pas empêchée d’être un port très actif où sont nées de grandes compagnies d’assurances comme Generali ou le Lloyd Autrichien.

Trieste et son port vus depuis les terrasses du Musée Revoltella.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Mélange de nationalités, de langues, de religions, Trieste a séduit James Joyce, Rainer Maria Rilke, Casanova, Freud, Paul Morand pour ne citer que quelques intellectuels. Mais Chateaubriand et Stendhal n’ont pas succombé à son charme. Et puis il y a parmi les écrivains locaux Italo Svevo que je ne me lasse pas lire et de relire. Passant seulement un jour et demi à Trieste, je n’ai pu avoir qu’une impression fugace. Mais grâce à Paola Alessandra Alzetta, mon guide, qui m’a organisé un circuit très spécifique en fonction de mes demandes, j’ai vu un condensé de Trieste en un temps record. J’ai profité de sa culture et de son excellente connaissance de la ville pour découvrir en empruntant les chemins de traverse qui nous ont permis de passer d’un quartier à un autre de cette ville de la région Frioul Vénétie Julienne.
Et même de voir des boutiques qui ont su rester hors du temps.
Trieste et la mer toujours
Trieste est un port et c’est une évidence car elle est bordée par l’Adriatique sur toute sa façade. Et la Piazza Dell’Unita, vaste place au fond de laquelle siège la maire de style éclectique donne sur la mer.
Sur cette place majestueuse, j’avoue que j’ai un petit faible pour le Palais du gouvernement, au numéro 8, construit par Emil Hartmann en 1905 et habillé de mosaïques raffinées.
Le Palais du Conseil régional, au numéro 1, occupe les anciens locaux du Lloyd autrichien.
De la Piazza Dell’Unita on voit des bateaux dans tout le golf et des installations portuaires. Les installations portuaires modernes sont en pleine activité, les installations anciennes vont faire l’objet d’un vaste projet de réhabilitation pour y installer une marina, un centre de congrès et des hôtels. Ce n’est pas étonnant que dans ces conditions ait lieu à Trieste la Barcalona, la plus grande régate du monde qui rassemble 2.000 embarcations dans le golfe le deuxième dimanche d’octobre. Clin d’œil à Venise, sa rivale, Trieste a aussi un Canal Grande.
La mer pénètre à l’intérieur des terres et vient buter sur l’église néoclassique de Sant’Antonio Taumaturgo.
Trieste, culture en tous genres et Liberty
Trieste est réputée pour avoir une offre culturelle abondante et de bon niveau. Et je n’en doute pas. Paola Alzetta a eu l’excellente idée de me faire parcourir quelques salles du Musée Revoltella. Il s’agit tout d’abord d’un très beau bâtiment construit par Pasquale Revoltella (1795-1869), proche de l’archiduc Maximilien de Habsourg, qui s’impliqua dans les assurances Generali, le Lloyd autrichien et le Canal de Suez. Manquant de place pour exploiter les collections, la municipalité de Trieste racheta le palais Brunner et plus tard le palais Basevi. L’ensemble fut restructuré par Carlo Scarpa et le musée Revoltella rouvrit en 1992. J’ai découvert des peintres de Trieste que je connaissais absolument pas et que j’ai très envie de mieux connaître et j’ai appris que Léonor Fini vécut à Trieste jusqu’à l’âge de 17 ans.
Au cours de nos déambulations, j’ai arpenté des ruelles, traversé des avenues, vu l’ancien Théâre romain.
J’ai aperçu des places majestueuses.
Et les fontaines ne manquent pas.

La Fontaine des quatre continents sur la Piazza Dell’Unita à Trieste.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
L’architecture mussolinienne a aussi laissé des traces à Trieste avec des bâtiments bien représentatifs de ce style.
J’ai rencontré Umberto Saba, Italo Svevo et James Joyce dont les statues jalonnent la ville.
Les églises sont nombreuse mai la chapelle de la résidence de l’évêque par l’architecte dont l’entrée est cachée est sans doute l’une des pus originales. Elle est l’oeuvre de Vurnik qui a réalisé la Banque coopérative à Ljubljana.
J’ai pu contempler l’église serbe orthodoxe San Spiridone (9 via san Spiridone).
La synagogue centrale (19 via San Francesco) dont la construction avait été confiée à Ruggero et Ardouino Berlam (1906-1912), tellement imposante que de quelque côté qu’on se trouve on manque de recul pour la voir dans son ensemble.
Et comment imaginer découvrir une ville sans pouvoir y débusquer des réalisations Art nouveau ou plutôt Liberty, en Italie. Pour commencer côté port, l’ancienne halle aux poissons (1913) largement éclairée par des parois vitrées et à laquelle l’architecte Giorgi Polli a adjoint une tour.

Exemples de décors de l’ancien marché aux poissons de Trieste.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Piazza della Borsa, Max Fabiani a orné la façade de la Casa Bartoli (1906) de cascades de feuilles sur fond de treillis.
Extrêmement démonstrative et fastueuse, la Casa Terni, 6 via Dante Alighieri est une démonstration de Liberty débridé et luxuriant, œuvre de Romeo Despoli. Un pur plaisir à détailler sous tous les angles.
Très réussi le palais des architectes Viviani-Ghiberti qui ouvrit à Noël 1907, 35 viale XX settembre, évite toute mièvrerie. Les décors sont riches et puissants. Les statues de femmes du sculpteur Romeo Rathmann qui encadrent l’entrée sont majestueuses.
Enfin, l’Hôtel Balkan que Max Fabiani avait construit 14 vua Filzi en 1904 pour accueillir la communauté slovène de Trieste avec un restaurant, un théâtre, différents équipements et un hôtel. L’immeuble simple était orné de vitraux de Koloman Moser qui n’existent suite à un incendie déclenché par des fascistes.

Détails du bâtiment 52 via San Francisco d’Assisi à Trieste.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Et, 52 via San Francisco d’Assisi, une petite merveille de type Sécession avec mosaïques en damiers ou en frises, ferronneries délicates, jeux de formes rondes et triangulaires à sauver de toute urgence avant qu’elle ne tombe en ruines.
Trieste et le café
Mais que ce serait Trieste sans le café ? Impossible de faire l’impasse sur les liens qui existent entre cette plante et la ville. C’est par Trieste que le café arrivait dans l’empire austro-hongrois. Et on connaît la réputation des cafés littéraires ou non à Vienne et à Budapest. A Trieste où le café arrive, est transformé, il est aussi bu dans des cafés qui, pour certains, sont devenus célèbres. Aucun visiteur censé, même amateur de thé comme moi, ne ferait pas la tournée de ces cafés d’autant plus que l’Office du tourisme de Trieste, Discover Trieste et Promo Turismo FVG ont eu l’idée d’éditer un petit carnet vendu 3 euros. Ce pass permet de déguster six cafés de son choix –noir, machiatto, espresso, décaféiné dans une tasse ou dans un verre- au comptoir. Les cafés sont repérés sur un plan, vous n’avez plus qu’à déguster.
Si vous voulez marcher sur les traces d’Italo Svevo ou de Claudio Magris, vous choisirez le Caffé Tommasso. Le Caffé degli Specchi, sur la Piazza Dell’Unita était considéré comme le quartier général de la marine britannique durant la Deuxième Guerre mondiale.
L’Antico Caffé Torinese avait été lancé en 1919 par Giuliano Debelli, un décorateur de paquebots. Inauguré en 1867, le Caffé Stella Polare était fréquenté par James Joyce. Le Harry’s Grill qui fat partie du Grande Hotel Duchi d’Aosta donne, lui aussi, sur la Piazza Dell’Unita. L’accueil n’y est pas toujours agréable. La Pasticceria la Bomboniera se revendique de tradition austro-hongroise.
C’est un lieu raffiné et intime qui a plus l’allure d’un salon de thé que d’un café. L’Antico Caffé San Marco a eu la faveur des étudiants et des intellectuels dés sa création.
Cet établissement dont les murs appartiennent à Generali a failli disparaître. Il avait été endommagé et laissé à l’abandon. Il a retrouvé toute sa superbe et la faveur de la clientèle. Le café a été racheté par le libraire de la rue qui s’est installé dans une partie du local et le décor a été rénové à l’identique.
Le fronton du bar et le tour de la salle sont est habillés de feuilles en relief brun doré et les médaillons disposés sur deux niveaux sur les murs ont été dégagés. Les uns représentent des scènes un peu légères, les autres font référence à l’univers du spectacle et du cirque. Quant au bar du Savoy, je l’ai testé de plusieurs façons puisque c’était mon hôtel.
Mon hôtel à Trieste
Le Savoia Excelsior Palace m’avait paru séduisant en photo et il a bel allure. Construit par l’architecte autrichien Ladislau Fiedler et inauguré en 1912, il a reçu à plusieurs reprises l’empereur François Joseph.
Rénové il y a quelques années, il a gardé le faste de son grand salon à colonnes qui donne sur la mer, meublé de confortables canapés aux tons pastel. La partie bibliothèque cultive des tons plus sourds et intimistes.
Une belle cohabitation de deux styles différents et qui se valorisent l’un l’autre. Les chambres sont bien aménagées et j’ai trouvé la literie particulièrement confortables. Bouteille d’eau minérale et machine à café sont mis à disposition. La salle de bain en marbre est spacieuse, la robinetterie à l’ancienne magnifique. Il y a même une douche italienne avec sièges abattable et tubulures pour se relever pour des personnes d’un certain âge ou qui seraient fatiguées par leur découverte de Trieste. Dommage que les produits d’accueil soient réduits au minimum. Il n’y a même pas de coton à démaquiller ! Mais les mules turquoises sont ravissantes.
Grosse déception en raison du manque de professionnalisme et de l’inconscience du voiturier. Quand nous avons demandé qu’on nous ramène du garage notre voiture pour partir, nous l’avons retrouvée sur le devant de l’hôtel non fermée, une vitesse enclenchée (pour faire des dégâts ou renverser quelqu’un rien de mieux), la radio allumée, le clignotant et les codes allumés. Inconcevable !
Cette visite rapide de Trieste m’incite à revoir cette ville ne serait-ce que pour visiter le Château Miramare et pour profiter de tous ses atouts et ceux de sa région environnante. Car en Frioul Vénétie Julienne, il y a d’autres villes au patrimoine riche, une nature préservée avec 16.000 hectares de lagunes ainsi que 3 parcs et 13 réserves naturelles et un terroir plein de promesses pour les gourmands.
Pour ceux qui voudraient faire appel aux services de guide conférencière de Paola Alessandra Alzetta qui connaît aussi bien la Région Frioul Vénétie Julienne que Trieste, voici son contact : paolaalzetta@hotmail.com, tél. 39 349 1086117. Elle parle français, anglais et allemand.
Pour préparer son voyage à Trieste
Avant le départ, consulter les sites de l’Office du tourisme d’Italie et de Frioul Vénétie Julienne bourrés d’informations.
Pour aller à Trieste
En tant que Bordelaise, j’ai opté pour un vol Bordeaux-Venise opéré par Volotea et j’ai loué une voiture à l’aéroport de Venise Marco Polo. Une centaine de kilomètres séparent Trieste de sa rivale Venise.
Thanks for bringing back the memories! I went to Trieste 2 years ago too.
https://aboutartnouveau.wordpress.com/2016/01/02/caffe-san-marco-via-battisti-18-trieste/
J’aimeJ’aime
I am happy to bring back to you good memories. My problem is that I couldn’t stay in Trieste as long as I would have liked.
J’aimeAimé par 1 personne
Merci pour cet article ! Il va me servir pour ce week-end, je me rends à Trieste pour la première fois, curieuse de découvrir (entre autres) son architecture liberty.
J’aime beaucoup l’art nouveau, j’ai pour habitude d’en traquer ses traces à chacun de mes voyages et bien souvent avant une nouvelle destination, je tombe sur ton blog… Alors merci !
J’aimeJ’aime
J’espère que tu arriveras à te repérer à partir de mon blog. Je suis une maniaque de l’Art nouveau et chaque fois que je voyage, j’essaie de me préparer un petit circuit Art nouveau. Par ailleurs, la ville est belle et possède d’autres atouts et puis il y a tous ces écrivains qui ont laissé leurs traces.
J’aimeJ’aime