Peu éloignée de Barcelone, la petite ville de Reus est un passage obligé pour les amateurs d’Art nouveau. Lluis Domenech i Montaner y a construit deux bâtiments modernistes, bien dans son style flamboyant et coloré : la Casa Navas et l’hôpital psychiatrique Pere Mata.

Une journée trop courte
En faisant un rapide aller et retour dans la journée entre Barcelone et Reus, on est loin de pouvoir explorer tous les atouts de cette ville. Tout d’abord, pour ceux qui sont intéressés, Reus est la ville du Vermouth. J’ai fait l’impasse sur cet aspect de la culture locale. J’ai dû aussi renoncer à faire une visite complète du centre historique qui affiche de belles façades modernistes mais moins spectaculaires que les deux œuvres majeures que je voulais absolument voir un peu plus en détails.
La richesse de Reus à la grande époque du Modernisme explique cette architecture très soignée dans tout le centre.
Et il ne faut pas oublier que Reus est la ville natale de l’illustre architecte Antonio Gaudi (1852-1926).

Reus lui a consacré un centre d’interprétation qui, en jouant sur l’interactivité et la technologie moderne, dévoile les grands axes de la création de ce génie catalan.
La Casa Navas

Installée au cœur de Reus à l’angle de la plaça del Mercadel et de la carrer de Jesus, la Casa Navas a été commandée en 1901 par le riche commerçant Joaquim Navas qui souhaitait y installer son magasin de textile au rez-de-chaussée, laissant carte blanche à Lluis Domenech i Montaner. Il saura tirer profit de cette liberté pour faire de la Casa Navas un véritable palais moderniste. C’est la boutique qui est terminée en premier et ouvre au public en 1905.

La demeure quant à elle est achevée en 1908 mais l’enrichissement des décors intérieurs se poursuivra pendant quelques années jusqu’à la pause des vitraux séparant les escaliers et le vestibule en 1911. Joaquim Navas meurt en 1915, sa veuve, Pepa Blasco, en 1928. Ils ne laissent pas d’héritiers directs. C’est à son neveu et filleul Joaquim Blasco que revient la Casa Navas.


Le 24 mars 1938, durant la Guerre Civile espagnole, la Casa Navas subit un bombardement. Les travaux de rénovation sont lancés en 1940 pour pouvoir louer l’immeuble à partir de 1943 et ils se poursuivent pendant des années. Finalement, en 2017, la Casa Navas est rachetée pour être ouverte au public en 2018.
Déchauches de sculptures, de mosaïques, de vitraux, de marqueteries autant d’éléments éblouissants complétés par le mobilier. Le tout forme un ensemble moderniste complet et rare.

L’Institut Pere Mata
Un peu à l’extérieur de Reus, l’Institut Pere Mata est aussi très intéressant. On peut s’y rendre en autobus mais cela vaut vraiment la peine de prendre un taxi pour ne pas perdre de temps et se consacrer aux plaisirs de la visite.

L’Institut Pere Mata est le premier établissement de santé construit par Lluis Domenech i Montaner avant de se lancer dans la conception de l’hôpital Sant Pau à Barcelone. L’idée de construire un établissement psychiatrique modèle revient au docteur Emili Brianso Planas qui reçoit le soutien de l’avocat et homme politique Pau Front de Rubinat.

Une société privée comptant 35 membres est constituée le 15 novembre 1896 pour soutenir ce programme ambitieux et novateur et le confier à Lluis Domenech i Montaner.

Le projet de cet établissement psychiatrique se développe sur une surface d’une vingtaine d’hectares avec dix-huit bâtiments les pavillons des malades mais aussi la chapelle, le pavillon des services généraux. Il devait répondre à certaines données de la psychiatrie modernes de l’époque : l’éloignement des secteurs habités, un espace libre avec de la végétation, une bonne ventilation et un exposition au soleil optimale.

Le tout est organisé sous forme de village prenant la forme d’une croix avec une grande allée centrale. En définitive, il n’y aura que six pavillons : deux pavillons de bienfaisance, un de troisième classe, celui des épileptiques, celui des services généraux et celui des privilégiés. Vient s’ajouter en 1911 la laverie qui n’était pas prévue. En matière d’adaptation aux besoins des patients, le principe retenu était qu’ils ne se sentent pas enfermés en pouvant voir l’extérieur.

Il n’y avait pas non plus de barreaux et c’est le fer remplaçant le plomb dans les fenêtres et les vitraux qui les rendaient plus solides. En outre, par mesure d’hygiène, les rampes sont supprimées, les interrupteurs pour l’éclairage sont centralisés et les angles sont arrondis. En 1936, avant la guerre civile, Pere Mata accueillait 1059 patients . Il faudra attendre 1955 pour retrouver ce niveau d’activité. Actuellement, Pere Mata continue à fonctionner et de nouveaux bâtiments ont été construits.

Désormais, on peut visiter le pavillon destiné aux patients riches qui aurait été livré en 1908. Construit en briques et décoré de panneaux en céramique bleus, il s’apparente plus à un hôtel de luxe qu’à asile de fous. Lluis Domenech i Montaner l’a aménagé pour rendre le séjour sûr et agréable. Au rez-de-chaussée, le salon, la salle-à-manger et la salle de jeux avec son billard montrent le niveau d’attention porté à l’agrément des patients. Sols en mosaïques, murs et plafonds habillés de céramique, vitraux, motifs de faune -paons ou cygnes- de flore ou de fruits déclinés dans des tons lumineux sont un plaisir pour les yeux et une invitation au délaissement.

A l’étage, les chambres dont le plafond de certaines sont à caissons sont pourvues d’un mobilier marqueté. Il est dommage que l’ouvrage qui avait été réalisé sur Pere Mata soit épuisé et qu’on ne puisse pas être sûrs du nom artistes qui ont accompagné Lluis Domenech i Montaner dans son œuvre créative.


A l’étage, les chambres dont le plafond de certaines sont à caissons sont pourvues d’un mobilier marqueté. Il est dommage que l’ouvrage qui avait été réalisé sur Pere Mata soit épuisé et qu’on ne puisse pas être sûrs du nom artistes qui ont accompagné Lluis Domenech i Montaner dans son œuvre créative.
Claude Mandraut
Ce reportage a été réalisé avec le concours de l’Office de Tourisme de Catalogne.