L’image de Bilbao est désormais inséparable du Guggenheim. Mais Bilbao c’est aussi autre chose. Moins aristocratique que sa voisine, Saint-Sébastien, et plus industrieuse, cette ville a aussi beaucoup de chic.

Teatro Campos Eliseos, les raffinements d’un bâtiment moderniste de Bilbao.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Quand j’ai décidé de faire une halte à Bilbao, c’était surtout pour ne pas faire d’une seule traite le voyage que je projetais. A la réflexion, j’ai pensé que je pourrai découvrir le fameux Guggenheim. Et, en faisant quelques recherches rapides, j’ai constaté que le Modernisme ainsi que s’appelle l’Art nouveau en Espagne s’était aussi exprimé à Bilbao. Une excellente surprise. Je n’allais pas passer à côté d’une telle opportunité d’autant plus que ce que je voulais voir se trouvait dans le même périmètre, de l’hôtel aux découvertes en tous genres. Etonnant et agréable, à Bilbao, on entre d’emblée dans la ville depuis l’autoroute sans perdre de temps ou traverser des zones commerciales peu flatteuses. Et je suis arrivée au niveau du Guggenheim. Une belle entrée en matière.
Le Guggenheim, renouveau de Bilbao
Le Guggenheim a incontestablement donné à Bilbao la dimension d’une ville internationale qui s’intéresse à l’art et qui bouge. Installé à l’emplacement d’une ancienne zone industrielle, au bord du Nervion, dans un site bien dégagé, le Guggenheim se laisse admirer de tous les côtés et montre la complexité de ses volumes qui en font une gigantesque sculpture composée de 33 000 plaques de titane jouant avec le verre et se mariant avec la pierre.

Autour du Guggenheim, des oeuvres qui font partie des collections du musée.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Il a été construit entre 1993 et 1997 par le célèbre architecte Frank Gehry. Des œuvres d’artistes contemporains sont installées tout autour comme les Tulipes multicolores de Jeff Koons, Puppy, animal fleuri de Jeff Koons aussi, le Grand arbre et l’œil d’Anish Kapoor composé de boules brillantes en acier, Maman, l’araignée géante de Louise Bourgeois, ou sur le Nervion Arcos Rojos de Daniel Buren.

A l’intérieur du Guggenheim de Bilbao, des volumes et des lignes aussi forts que les mouvements des façades extérieures.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
A l’intérieur, la lumière pénètre de toute part et vient ricocher sur des structures aux courbes audacieuses.
L’Ensanche de Bilbao
Centre de l’Ensanche, la place Don Federico Moyua, est un point de repère vers lequel convergent les rues rectilignes dont la Gran Via de Don Diego Lopez de Haro qui le relie au Casco Viejo.

L’imposant bâtiment de la Diputacion Foral sur la Gran via de Don Lopez de Haro à Bilbao.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
L’aménagement de ce secteur de Bilbao créé fin XIX ème/début XX ème siècle selon le plan de Severion Achucarro, Pablo de Alzola et Ernesto Hoffmeyer approuvé en 1876 a été rendu nécessaire par le développement de la ville qui s’enrichit grâce aux nombreux gisements de fer de la région grâce auxquels s’enracine une puissante industrie sidérurgique et navale.
C’est là que le Modernisme va pouvoir s’exprimer mâtiné d’éclectisme. La bourgeoisie va s’installer dans ces nouveaux immeubles. Si le modernisme est bien moins présent qu’à Barcelone, par exemple, quelques immeubles attirent le regard.

Palacio de Chavarri sur la place Don Federico Moyua à Bilbao.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le Palacio de Chavarri, 5 plaza Don Federico Moyua, construit par le belge Paul Hankar en 1894 est surmonté de petites tourelles pointues recouvertes d’ardoise dans un esprit néo-flamand.

L’arrière du Palacio de Chavarri avec une grosse tour ronde qui enveloppe un escalier.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Tout près, la Casa Montero, 34 calle Alameda Recalde, est envahie par une végétation exubérante.

La Casa Montero, un des plus beaux immeubles modernistes de Bilbao.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.

Détail des encadrements des ouvertures de la Casa Montero à Bilbao.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Ce grand bâtiment d’angle conçu par Aladren et Darroquy est en outre doté d’une porte d’entrée très travaillée en bois clouté et découpé, orné de fer forgé aux belles volutes et de garnitures en cuivre.

La porte de la Casa Montero aux détails soignés à la hauteur des décors modernistes de la façade.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le Teatro Campos Eliseos réalisé par le français Jean-Baptiste Darroquy fut terminé en 1902.

Composition autour d’un arc très travaillé pour la façade du Teatro Campos Eliseos.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Le grand arc central de sa façade est en dentelle de pierre avec des inclusions de céramique de Daniel Zuloaga.
L’Alhondiga qui a pris le nom d’Azcuna Zentroa en 2015 est un gigantesque entrepôt de vin imaginé en 1905 par l’architecte bilbaino Ricardo Batista (1879-1953) ne peut pas renier son inspiration Art nouveau.
Abandonné depuis les années 70, il revit depuis 2010 et s’est transformé en centre de culture et de loisirs. Philippe Stark y a construit trois « boîtes » en briques soutenues par les 43 colonnes de l’Italien Lorenzo Baraldi. Leur fantaisie et leur diversité sont bienvenues face à la sobriété des boîtes et à l’exubérance des décors extérieurs de Ricardo Batista.
Elles sont réalisées dans des matériaux variés : marbre, briques, bois, bronze, ciment ou acier. La gare de la Concordia « F-C de Santander a Bilbao » a été restructurée.

Dans un esprit moderniste, la gare Concordia de Santander à Bilbao.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Ne restent plus dans le hall intérieur que les poteaux en fonte. Mais la façade n’a pas été altérée avec son arc central souligné de carreaux à motifs de feuilles verte sur fond jaune. Plus tardive, la Poste centrale (19 Alameda de Urquijo) de 1927, en brique et calcaire, s’oriente vers la sobriété de l’Art déco. Son architecte, Secundino de Zuazo, l’a pourvue d’un grand auvent au-dessus des boîtes aux lettres et d’une entrée grandiose dans un esprit baroque.

Sous l’auvent, une rangée de lions gardes les boîtes aux lettres de la Poste de Bilbao.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
A aller voir, même sans avoir besoin d’expédier du courrier.
Et le musée des Beaux-Arts de Bilbao est l’endroit idéal pour découvrir les peintres basques. Mais ma visite était surtout motivée par la présence de pièces de Francisco Durrio (1868-1940). Cet artiste peu connu du grand public est né à Valladolid qui fit ses études à l’école des Beaux-Arts de Bilbao a aussi vécu entre 1901 et 1904 au Bateau-Lavoir à Paris.
Et c’est dans l’atelier d’Ernest Chaplet qu’il s’est familiarisé avec la céramique. Il aurait ensuite appris à Picasso les règles de la cuisson de l’argile. Au musée des Beaux-Arts, on peut admirer des céramiques et des pièces d’orfèvrerie Francisco Durrio. Pour ma part, je suis plus sensible à sa façon de travailler les métaux. Le musée des Beaux-Arts de Bilbao a organisé en 2013 une grande exposition sur Francisco Durio pour présenter son œuvre y compris ses peintures. Malheureusement, je n’ai pas pu la voir.
Le Casco Viejo de Bilbao
J’ai juste fait une petite incursion dans le Casco Viejo de Bilbao ou Siete Calles en traversant le Puente del Arenal. Trop courte pour détailler les atouts de ce quartier ancien mais suffisante pour en apprécier l’ambiance. Premier immeuble à attirer le regard depuis ce pont, le Teatro Arriaga pour lequel Joaquim Rucoba s’est inspiré de l’Opéra de Paris.
Le bâtiment inauguré en 1890 a et exposé aux inondations de 1893 en raison de la proximité du fleuve.
En allant plus avant, j’ai pu voir au passage la Bibliothèque municipale avant de pénétrer dans la cathédrale de Santiago cernée de près par les maisons environnantes.
Une étonnante petite échoppe d’anchois est adossée au bâtiment religieux.
Dernière visite, celle du marché de la Ribera.

De l’autre côté de la ria de Bilbao, face au marché de la Ribera.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
En bord de fleuve, le marché de la Ribera existe depuis le XIV ème siècle mais le bâtiment tel qu’on peut le voir a été créé en 1929 par Pedro Ispizua.
Avec ses colonnes blanches et ses chapiteaux couleur brique, il ressemble à un petit palais dédié à la gastronomie.
Depuis 1971, ce n’est plus un marché dédié aux grossistes, tout le monde peut aller y faire ses emplettes.
A l’une des entrées, les bars à pintxos sont regroupés.

Assortiment de pintxos de l’un des bars du marché de la Ribera.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
Leurs comptoirs regorgent de bocadillos, olives et autres compositions des plus appétissantes. Il est orné de vitraux colorés et la lumière rentre à flots car entre les structures de la charpente en béton, viennent s’insérer des vitraux bleus et blanc.
En face, les promeneurs cheminent dans un passage couvert le long des immeubles, séparé de la circulation par des arcades.

Face au marché de la Ribera, les fresques du plafond sous les arcades.
Photo City Breaks AAA+, Claude Mandraut.
De grandes fresques sont peintes au plafond. A regarder attentivement car elles racontent une histoire et ne sont pas seulement décoratives.
Un coup d’œil aux rues adjacentes et on peut apercevoir ici ou là quelque palais Renaissance ou des bâtiments plus récents.
Mon hôtel à Bilbao, le Carlton
Je n’ai pas hésité longtemps avant de faire ma réservation à l’Hôtel Carlton, un 5*, le premier hôtel de luxe de Bilbao, inauguré en 1926 après sept ans de travaux menés par l’architecte Manuel Maria Smith Ibarra.
C’est aussi le premier hôtel espagnol à avoir ajouté des salles de bains à ses chambres ! S’inspirant du Second Empire français, l’architecture de ce bâtiment en forme de triangle est sobre et équilibrée dans ses volumes. L’entrée harmonieuse s’ouvre sur le grand hall qui se distingue par une vaste coupole ovale (l’une des deux plus grandes en Espagne) dont les vitraux ont été réalisés par Vidrieras de Arte en 1925 à partir de verres importés de Boston.
C’est la même entreprise bilbaina qui en a assuré la restauration en 2004. Par ailleurs, le Carlton est devenu le siège du Gouvernement Basque durant la guerre civile. D’autres vitraux en verre imprimé blanc à la réception et dans les couloirs, évoquent les anciennes activités de Bilbao.
Autant d’éléments qui ont conduit l’actuel Gouvernement Basque à déclarer le Carlton Monument architectural, historique et culturel en 1995. C’était l’hôtel idéal pour ma courte visite de Bilbao d’autant plus qu’il se trouve place Federico Moyua, au centre de l’Ensanche et tout près du Guggenheim. Petit plus, le Carlton se trouvant en centre ville, il possède un garage très pratique quand on y arrive en voiture. Il est conseillé de réserver le parking en même tant que sa chambre car les places sont peu nombreuses. A l’usage, le Carlton s’est avéré à la hauteur de sa réputation avec un personnel efficace et aimable dès la réception. Les chambres sont confortables, bien agencées, décorées dans un style sobre et cossu à la fois. Les produits d’accueil sont complets dans la salle de bains spacieuse, en marbre.
La penderie est d’une bonne capacité. Juste une remarque, nous aurions apprécié d’avoir une bouilloire pour le thé et une cafetière ainsi qu’une bouteille d’eau offerte en dehors de ce que contient le mini-bar. La salle de petit-déjeuner est assez grande pour préserver l’intimité des convives.
Le buffet est de bonne qualité avec notamment un jambon sublime dont le plateau est rechargé très régulièrement. Nous avons même eu des cerises au mois d’août. Et surtout, pour mon plus grand plaisir, j’ai pu avoir des churros et du chocolat chaud, qu’on ne trouve plus que très rarement en Espagne au petit-déjeuner alors que c’était la tradition il y a… quelques décennies.
A lire pour mieux comprendre l’urbanisation de l’Ensanche
Ricardo Batista un arquitecto para Bilbao par Elias Mas, bbk, 2000.